En courses dans les rayons d’un célèbre hypermarché, je tombe nez-à-nez avec une tête de gondole très particulière, contenant des dizaines de livres pour enfants sur les émotions. Si j’ai pris l’habitude, depuis longtemps déjà, de trouver des rayonnages entiers de soupe au bien-être pour adultes, je n’avais pas conscience que la commercialisation du système émotionnel des petits avait pris une telle ampleur.
Catégorie : Psy et pédagogie

Pourquoi demeurons-nous englués dans des relations qui nous rappellent d’anciens tourments ? Parce que nous espérons qu’un jour ça changera, pourvu que nous trouvions le mot juste, l’attitude appropriée, que nous sachions faire preuve de la compréhension nécessaire.
Alice Miller
Il y a vingt ans, Notre corps ne ment jamais était publié, livre dont le titre rappelle l’excellent Le Corps n’oublie rien, du psychiatre Américain Bessel Van Der Kolk, ouvrage que j’ai chroniqué le mois dernier. Ce livre se situe dans la droite ligne de la pensée d’Alice Miller, psychanalyste engagée pour la cause des enfants, qui a dénoncé, dès les années quatre-vingts, l’éducation répressive et ses conséquences.

On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. (Héraclite)
Il est des phrases qui marquent un parcours, au point qu’elles nous reviennent régulièrement en écho plus tard. Quand on change, on a changé, était l’un des mantras de Nicolas de Beer et Isabelle Laplante, auprès de qui je me suis formé au coaching entre 2009 et 2011. Ils exprimaient là leur croyance dans un monde en perpétuel changement, en un équilibre sans cesse renégocié. Une croyance qui nous soutient lorsque la vie nous fait croire à un douloureux retour en arrière.

Souvent subie plus que souhaitée, la colère fait partie des émotions de base, comme on peut l’apprendre de façon agréable aux enfants grâce à l’excellent Vice-Versa, que j’avais chroniqué ici. Je ne m’étendrai pas sur la colère en elle-même, il existe une littérature psy plus que conséquente sur le sujet. On en trouve en particulier sur les bienfaits de la colère, lorsqu’elle peut être mobilisée sans violence, dans l’expression d’une bonne agressivité, afin d’affirmer une position et de mettre des limites aux autres.

« Je ne suis pas d’accord. »
Cette sentence clôt souvent l’échange de façon précoce, sapant à la base le dialogue à naître. Car justement, Je ne suis pas d’accord signe le début d’un dialogue, non sa conclusion.

Les métiers de l’accompagnement sont faits de contradictions, de paradoxes, de décalages, de confusions. La première confusion potentielle résidant probablement dans le fait que l’autre, celui que j’aide, que j’accompagne, à qui j’enseigne, est également celui qui me fait vivre.

Dans Le Bruit des lames, mon livre sorti en septembre dernier, je raconte la façon dont j’ai été – en tant que jeune éducateur sportif – débordé par mon implication dans mes relations avec mes élèves escrimeurs. J’y aborde notamment la question de la séduction et du désir, sujet brûlant sous les feux de l’actualité aujourd’hui, ainsi que d’autres questions que je pouvais me poser à l’époque :

Une nouvelle fois, je vais m’attarder sur la discipline que je pratique depuis plus de trente ans et enseigne depuis vingt ans : l’escrime. Au-delà, il s’agit d’une réflexion sur les sports d’opposition et de compétition, encensés par certains, décriés ailleurs, notamment parce qu’ils formeraient à écraser l’autre. Je pense pour ma part qu’ils contribuent à apprendre à s’appuyer sur lui.

Un jour ou l’autre, il fallait bien que je me confronte aux gros mots de la psy. Ne pas parler du transfert alors qu’on écrit sur le point de vue de l’entraîneur, et qu’on est psy par-dessus le marché, c’est un peu comme de faire de l’escrime avec des sabres en mousse ; à un moment ou un autre ça a ses limites.

Atlas, le monde sur ses épaules
Dans la mythologie grecque, Atlas est condamné par Zeus à porter la voûte céleste à bout de bras, mais il est souvent représenté portant le monde sur son dos. L’atlas, c’est également la première vertèbre cervicale, celle qui soutient la tête, notre monde interne, personnel. Parfois ce dernier pèse lourd, lui aussi.

Souvenir d’une journée de formation au coaching professionnel il y a une dizaine d’années. Le thème du jour pour notre petit groupe de huit apprentis-coachs : l’estime de soi…

Le magazine We love tennis et son équivalent papier Grand Chelem m’accordent ce mois-ci une interview dans le cadre du dossier qu’ils consacrent à la culture de la gagne. L’occasion pour moi de m’exprimer sur le sport de haut niveau, la compétition, la victoire, la défaite, des sujets que j’ai pu aborder au cours de plusieurs articles, notamment dans celui-ci où je fais l’hypothèse que la compétition sportive est avant tout un terrain propice pour apprendre à perdre.

L’autorité d’un groupe (…) est toujours beaucoup plus forte et beaucoup plus tyrannique que celle d’un individu, si sévère soit-il.
Hannah ARENDT
Après-midi de vacances dans un gymnase francilien. Une quinzaine d’enfants de 8 à 14 ans, répartis en trois équipes, disputent un tournoi de balle assise. Le but : toucher les joueurs de l’équipe adverse afin de les éliminer.

L’un des intérêts de la pratique d’une activité sportive compétitive, qu’elle soit individuelle comme l’escrime, le tennis ou la course, ou bien collective comme le football ou le basket, c’est la possibilité de se mesurer aux autres ; même si, comme je l’évoquais dans un précédent article sur l’apprentissage de la défaite par la compétition, une conception des relations basée sur un étalonnage permanent est inadaptée, tout comme l’est celle qui consiste à nier la rivalité et les rapports de pouvoir. Se mesurer, se comparer, se différencier, sont des activités fertiles dans la construction du narcissisme ; il y a là un mouvement qui vise à intégrer la reconnaissance de l’autre en coexistence avec le maintien de soi.

Vous connaissez certainement ces jeux qui se pratiquent avec une, voire deux cordes élastiques. Les élèves de mes cours d’escrime adorent. J’accroche ma corde à un point fixe et la fais tourner, pendant que les petits escrimeurs passent dessous tour à tour dans une série d’exercices à difficulté croissante et tentent d’éviter de se faire toucher. Tel un véritable robot, aguerri par des années de pratique, je fais tourner la corde avec une régularité de métronome, tandis que la sanction tombe, implacable, pour ceux qui se trouvent sur sa trajectoire parce qu’ils n’ont pas traversé dans la bonne fenêtre de tir.