Ce billet fait écho à celui que j’avais publié ici-même en juin 2022 sur la multiréférentialité et le fantasme de la boîte à outils. Comme le premier, il est issu des écrits que j’ai présentés à la fin de mon cursus de formation. Cet extrait présente la médaille et son revers ; il détaille l’enjeu profond auquel se confronte le praticien multiréférentiel face à la posture thérapeutique qu’il souhaite épouser.

N.B. Ce billet n’est le fruit d’aucune collaboration commerciale, mais de l’estime professionnelle et de l’amitié.
Le livre n’est pas un secteur porteur ; le livre pour psy, encore moins, en dehors de la soupe indigeste du développement personnel, qui peut voir émerger parfois quelques bestsellers. Il faut être passionné pour publier autour de la psychothérapie et de la psychanalyse. Il s’agit d’un acte de foi. Mais en plus de cela, il faut être compétent, choisir des auteurs, trouver des thèmes ; la bonne volonté ne suffit pas.

Vouloir dominer les représentations évite à l’homme de se confronter au réel du devenir, mais le plonge dans l’impuissance et la tristesse.
Miguel BENASAYAG, Le mythe de l’individu
« Je voudrais tellement comprendre ».
Combien de fois entendons-nous cette phrase dans nos cabinets. Voici la litanie de celles et ceux qui ont été dupés, trahis. Voici l’erreur fondamentale sur laquelle repose l’édifice de la manipulation : le désir universel d’un sens à mettre sur les comportements de l’autre, d’une clé à trouver pour résoudre les problèmes de l’existence.
Je vous invite à prendre un moment ensemble : essayons de comprendre pourquoi il est parfois nécessaire, justement, de ne pas chercher à comprendre.

S’il existe un moyen d’atteindre le Mieux, il demande de regarder le Pire en face.
Thomas HARDY
La saison deux de la série Bref est sortie le 14 février dernier, battant des records de lancement pour une série française. Au cours d’un épisode, l’écriture et la mise en scène créative de Kyan Khojandi et Navo permettent de mettre le doigt sur un ressort essentiel de la rencontre amoureuse : l’illusion.

Chaque année en dernière semaine d’août se tient le séminaire d’été du CIFPr (Centre Interdisciplinaire de Formation à la Psychothérapie Relationnelle). Cette école de formation à la psychothérapie multiréférentielle, la dernière à proposer un cursus transversal depuis la fermeture de la regrettée Nouvelle Faculté Libre, ouvre alors ses portes aux professionnels extérieurs ou aux patients déjà en thérapie.

En courses dans les rayons d’un célèbre hypermarché, je tombe nez-à-nez avec une tête de gondole très particulière, contenant des dizaines de livres pour enfants sur les émotions. Si j’ai pris l’habitude, depuis longtemps déjà, de trouver des rayonnages entiers de soupe au bien-être pour adultes, je n’avais pas conscience que la commercialisation du système émotionnel des petits avait pris une telle ampleur.

Ce n’est pas en regardant la lumière qu’on devient lumineux, mais en plongeant dans son obscurité. Mais ce travail est souvent désagréable, donc impopulaire.
C. G. JUNG
Devenez la meilleure version de vous-même ! Le slogan est tellement épuré que Blanche Gardin en a déjà fait une série pour Canal+ en 2021. C’est dire si ce poncif a d’ores et déjà envahi l’espace médiatique. On le lit, le voit, l’entend partout dans les médias ; à en croire les apôtres de cette nouvelle religion, nous sommes toutes et tous engagés sur la course effrénée qui nous mènera – si nous suivons leur nouvel évangile – à la félicité suprême : devenir ce qu’il y a de meilleur en nous et remiser définitivement le reste.

Pourquoi demeurons-nous englués dans des relations qui nous rappellent d’anciens tourments ? Parce que nous espérons qu’un jour ça changera, pourvu que nous trouvions le mot juste, l’attitude appropriée, que nous sachions faire preuve de la compréhension nécessaire.
Alice Miller
Il y a vingt ans, Notre corps ne ment jamais était publié, livre dont le titre rappelle l’excellent Le Corps n’oublie rien, du psychiatre Américain Bessel Van Der Kolk, ouvrage que j’ai chroniqué le mois dernier. Ce livre se situe dans la droite ligne de la pensée d’Alice Miller, psychanalyste engagée pour la cause des enfants, qui a dénoncé, dès les années quatre-vingts, l’éducation répressive et ses conséquences.

le trauma soigné à la sauce intégrative
Le Corps n’oublie rien est un ouvrage de Bessel van der Kolk, psychiatre américain ayant passé une bonne partie de sa vie et de sa carrière à étudier le syndrome de stress post-traumatique. Fondateur du trauma center de Boston, il a conduit de nombreuses études scientifiques d’une valeur essentielle pour notre compréhension des effets du trauma sur la personnalité.

Les traumatismes vécus dans l’enfance continuent d’agir en nous durant toute notre vie. Voilà une idée bien peu originale et désormais très répandue. Comment cela fonctionne-t-il, c’est une autre affaire. Car même si nous découvrons par exemple la façon dont les schémas neuronaux se développent, ou au contraire s’inhibent, en lien avec des zones traumatiques de notre histoire, il est difficile de se représenter comment ce que nous avons vécu peut ainsi nous travailler plusieurs décennies plus tard, et à notre insu par-dessus le marché. Voici un exemple qui qui n’a pas la prétention de donner une explication, mais qui nous fournit une métaphore plutôt parlante.

Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière.
(citation attribuée aléatoirement à Michel Audiard ou à Groucho Marx)
Alain Robert, le Spiderman Français
En lisant un magazine lorsque j’étais ado, je me rappelle être tombé sur une image fascinante, celle d’un type escaladant un gratte-ciel à mains nues, sans matériel de sécurité ni autorisation. La vue en contre-plongée était saisissante et suffisait à faire ressentir le vertige. Il s’agissait d’Alain Robert, dit le Spiderman Français, spécialisé dans cet exercice.

Dépréciation de soi
Je suis très ennuyée de venir ici me plaindre de mes petits problèmes, alors que d’autres personnes souffrent vraiment, enfin je veux dire, plus que moi. Cette personne que j’ai croisée tout à l’heure dans votre salle d’attente semblait aller très mal, j’ai culpabilisé à l’idée que je venais avec des futilités, alors que certains ont de vrais enjeux…

La transmission d’Irvin Yalom
En 2002, le célèbre romancier et psychothérapeute existentiel américain Irvin Yalom publie L’Art de la thérapie[1], un ouvrage de transmission qui s’adresse aux jeunes générations de psychothérapeutes. Âgé de 71 ans (il en a 92 à l’heure où j’écris ces lignes), Yalom sent qu’il parvient à un moment de sa vie où la transmission devient un but majeur ; il souhaite laisser quelques traces de son expérience clinique d’un demi-siècle pour les générations de thérapeutes à venir.

Je poursuis ce mois-ci le recueil des billets traitant de près ou de loin à l’escrime, publiés sur ce blog depuis 2017. La première partie de cette compilation est disponible ici.